Sujet: Here we are again.. # Jorah Mer 3 Avr - 21:09
Here we are again Jorah & Lubna
Qui aurait cru qu'après tout ce qu'elle avait déjà enduré, elle se retrouverait une fois de plus devant la tombe d'un de ses amis. C’était pourtant bien réel. Valentin avait rejoint les autres.. Une triste vérité qu’elle n’arrivait pas à accepter. Il avait survécu à un attentat et elle avait naïvement crue qu’une fois sur le continent américain plus rien ne pourrait leur arriver. Elle ne pouvait s’empêcher de lui en vouloir. Val’ son ami, le deuxième cameraman avait été enterré la veille. Salomé n’avait pas survécu à l’attentat, la seule femme hormis elle parmi tous les hommes. Les deux jeunes femmes avaient tissé un lien particulier n’étant que deux. Et puis il y avait Aidan, lui non plus n’avait pas survécu à l’explosion. Ils étaient une équipe, une famille, un bon petit groupe de blagueurs soudés, solidaires et maintenant il ne restait plus rien. Tout s’était envolé comme si rien de tout cela n’avait existé... Selon les médecins, les survivants étaient dans une période de stress post-traumatique. Exactement dans la même situation que s’ils avaient été des soldats revenant d’Irak, sauf qu’eux n’avaient rien demandés. En voulant montrer la vie des combattants, celle des habitants d’un pays occupé et l’envers du décor, ils s’étaient retrouvés en plein milieu d’un attentat. Comment est-ce qu’un truc pareil pouvait être possible ? Lubna n’en était pas à ses débuts de carrière. Elle avait déjà vu de nombreux trucs, certains pas toujours très glorieux, mais là ça dépassait tout. Ils leur avaient dit que ce stress post traumatique était une réaction purement psychologique qui risquerait de les faire dérailler en prolongeant le cauchemar vécu là-bas. Il y a cependant une chose qu’ils avaient oubliée de leur dire. C’est que ce truc, cette réaction prendrait une place si importante dans leur vie que certains iraient jusqu’à se tirer une balle dans la tête pour tenter de faire sortir toutes les horreurs gravées à tout jamais dans leur mémoire. Un à un ils s’en allaient, ne laissant place qu’aux souvenirs. Parce que c’est la seule chose qui restait non ? Les souvenirs.. Il y en a certains qu’elle désirait plus que tout chasser de sa mémoire et d’autres qu’elle avait peur d’oublier. Leurs expéditions, les têtes d’endormies au lever du jour, les sorties nocturnes histoire de rigoler. Des moments uniques, intenses qui ne faisaient malheureusement pas le poids face aux cris de frayeur, de douleur qui l’empêchaient de dormir la nuit. La demoiselle était une fois de plus perdue dans ses pensées et une fois de plus elle sentit une larme -qu’elle chassa du bout des doigts- rouler le long de sa joue. Elle n’avait jamais aimé les enterrements, ce qui était certainement le cas de toute personne normale, mais c’était un coup dur de plus. Tyler avait décidé d’emmener sa famille en vacances le temps de se reconstruire et d’essayer de retrouver un semblant de vie normale. Lubna n’avait pas non plus eut de nouvelles de Jorah bien qu’ils habitent dans la même ville. Est-ce qu’elle l’évitait ? Ouai certainement, mais ce n’était pas volontaire, enfin peut être un peu.. De toute l’équipe il était de loin celui avec qui elle s’entendait le mieux alors pourquoi le fuir ? Sans doute parce qu’elle avait peur qu’il ravive de mauvais souvenirs.. C’était égoïste de sa part puisqu’il connaissait la même douleur qu’elle. Lubna sursauta brusquement en entendant un craquement sourd venir de derrière elle. En tournant la tête elle vit que le responsable de ce bruit lui était familier, ce joli brun n’était autre que Jorah.. - Salut Memphis. Un petit sourire s’afficha sur ses lèvres tandis qu’elle reportait son attention sur la pierre tombale ne voulant pas croiser le regard de Jorah trop longtemps.
Sujet: Re: Here we are again.. # Jorah Ven 5 Avr - 9:26
Here we are again
Les pneus crissèrent, firent s’envoler le gravier et explosèrent celui-ci contre les briques froides et dures du muret. La portière s’ouvrit et une botte noire se posa sur le sol, Jorah poussa un long soupir. Ce geste résumait tout ce qu’il pensait en cet instant, à devoir revenir dans un tel endroit après tout ce qu’ils avaient déjà vécu. Valentin avait cédé à la facilité, il avait préféré mettre fin aux souffrances plutôt que de les affronter et les supporter. Jorah ne pouvait l’en blâmer pour autant ! Chacun réagissait à sa façon. Lui, son secret pour se maintenir la tête hors de l’eau, c’était le déni. Aux yeux de tous, il allait bien. Le journaliste faisait tout pour prouver qu’il avait retrouvé un équilibre dans sa vie, qu’il était même prêt à retourner travailler ! Le matin, il partait faire un jogging pour se maintenir en forme, en après-midi il partait voir des amis, faire les courses, se balader ou flâner dans les boutiques et le soir, il sortait dans un bar, une discothèque, un restaurant … n’importe quoi pourvu qu’il n’ait pas à rester seul chez lui, assis dans le canapé à observer un écran de télé qui le tuait à petit feu.
Là, assis dans sa voiture, il ne trouvait pas le courage de se lever et de quitter l’habitacle sécurisant du véhicule. C’était dix fois plus simple de rester loin de cette grille impressionnante, noire et terminant par des piques. Passer cette frontière imaginaire que représentait le grillage, c’était accepter que Valentin n’était plus là. Trois, ça faisait beaucoup. Jorah inspira profondément et resserra son blouson, se persuadant que c’était la bonne chose à faire. D’un mouvement rapide et décidé, il quitta la voiture et la verrouilla. C’était dur … avancer vers un endroit qui allait lui faire du mal, qui allait rouvrir toutes ces blessures qu’il s’était tué à faire cicatriser. Le jeune homme passa la grille, voilà il était trop tard pour reculer.
Au loin, une silhouette. Elle était debout devant la tombe et elle ne pouvait appartenir qu’à une seule personne. Jorah l’observait, pétrifié sur place quand il l’avait vue de loin. De l’endroit où il était planté, il ne pouvait apercevoir ses lèvres parfaitement dessinées, ses hautes pommettes, ses yeux étincelants, ses taches de rousseur qui parsemaient son visage. Mais tous ces petits détails, il les visualisait clairement, Jorah et Lubna avaient passés des heures l’un avec l’autre. Après tout, ils étaient collègues ! Ils étaient aussi deux des trois derniers à avoir survécu à l’attentat. Allongés sur leur lit d’hôpital, ils s’étaient vus mutuellement dans un piteux état … et aujourd’hui, ils étaient sur leurs deux pieds et avaient retrouvés un semblant de vie quotidienne. L’espace d’un instant, Jorah hésita à faire demi-tour, la confrontation avec Lubna était une épreuve qu’il redoutait et il n’était pas sûr d’être prêt, pas sur la tombe de Valentin en tout cas !
Un petit pas en arrière et il tournait déjà le dos à la tombe, au cimetière, à sa collègue. Jorah aurait voulu s’en aller en courant et disparaître mais au lieu de ça, il se figea à nouveau. Il devait aller voir Valentin … et Lubna aussi. C’était comme un devoir envers eux, ils avaient formé un groupe – réduit à bien peu de choses aujourd’hui mais bon – et ils méritaient bien mieux qu’un jeu de dupe, au nom de leur amitié révolue. Jorah reprit donc la direction de cette fameuse tombe, celle qui renfermait toute une partie de sa vie, cette mission qui leur aura coûté bien plus cher qu’il ne l’aurait jamais prévu. Enfin, il arriva auprès de la demoiselle. Elle était toute proche, bien assez pour l’entendre arriver et Jorah plongea les mains dans les poches de son jeans, serrant les phalanges sur le tissu du vêtement. Ses dents aussi étaient serrées, le masque du parfait jeune homme qui allait bien venait de se craqueler et de se décomposer en un instant.
- Salut Carolls ! Je … je pensais pas te croiser ici …
C’était la première fois qu’il était maladroit avec les mots, avec elle surtout ! Jorah se passa une main sur la nuque, il ne savait pas comment réagir en cet instant. Faire comme s’ils étaient toujours un duo soudé ? Prendre une distance qui risquait de les blesser tous les deux ? Sur le moment, il préféra simplement rester planté derrière Lubna, sans trop savoir quoi faire. Il lui fallut une minute pour reprendre ses esprits et réaliser qu’ils étaient dans la même galère ! Alors sans partir dans le mélodrame, il se contenta de s’avancer d’un pas et de poser une main sur l’épaule de la jeune femme. Ils étaient tous les deux face à la tombe de Valentin et le spectacle était plus que macabre, c’était carrément surréaliste. Jorah finit par lâcher un petit rire nerveux.
- Putain … t’arrives à le croire toi ? Sérieux c’est Val là-dedans ! Mais qu’est-ce qu’il a foutu ?
Une minute passée avec Lubna et déjà, ses faux-semblants étaient totalement ruinés. Jorah pouvait mentir à la face du monde mais pas à elle, pas à celle qui lui avait tenu la main quand ils étaient à moitié mort sur le sable brûlant, leur sang s’écoulant à l’unisson entre les grains imbibés. Le journaliste se recula d’un pas et shoota dans les graviers, en envoyant quelques-uns valser un peu plus loin. Il sentait la colère et la rancœur envers une situation injustice monter et la seule chose qu’il parvint à dire fut :
Sujet: Re: Here we are again.. # Jorah Mer 10 Avr - 20:10
Here we are again Jorah & Lubna
La première chose qui l’interpella fut la voix hésitante de Jorah. Elle fouillait dans sa mémoire pour tenter de se souvenir d’un moment où elle aurait déjà pu entendre le jeune homme s’exprimer avec ce genre de petits malaises, mais rien ne lui vint. Elle était habituée au Jorah toujours joyeux, parfois grande gueule, mais surtout toujours sur de lui quand il s’adressait à elle. Certes, ce n’était qu’un petit détail. Un petit truc insignifiant qui suffisait pourtant à lui prouver que les choses avaient changés.
Elle contemplait le paysage qui l’entourait sans vraiment le voir. Le vent qui soufflait gentiment faisait bouger les feuilles de l’arbre imposant dont elle ignorait le nom. Le regard perdu entre les tombes, elle tentait vainement de réfléchir. Est-ce qu’il faisait froid ? Elle n’en avait pas l’impression, du moins cela ne venait pas du temps en tout cas. Lubna avait l’impression d’être une coquille vide, de ne plus rien ressentir. Ces derniers temps tout lui paraissait sombre et froid. Elle était incapable de savoir ce qu’elle voulait ou de prendre une quelconque décision. Après tout si elle avait fait le choix de rester à Bluebell comme son petit ami, - qui n’était maintenant plus que son ex - le lui avait demandé peut être que rien de tout cela ne serait arrivé. Elle aurait prévenu son équipe au dernier moment, c’est-à-dire deux heures avant le départ. Partir en mission de ce genre avec un seul cameraman n’était pas franchement possible. Ils auraient donc dû trouver quelqu’un pour partir à sa place. Cependant trouver une personne capable de faire son job, qui accepte de partir à l’improviste pour un reportage de plus d’un mois et dans un pays en guerre en plus de cela, ça aurait été totalement impossible en moins de deux heures. Ils auraient donc été obligés de repousser la date de départ et ne se seraient jamais trouvés sur le sable chaud d’Irak le jour où l’attentat a eu lieu. Une seule petite décision, un seul choix différent aurait pu être l’élément capable de tous les sauver. Ce n’était pas elle qui était l’auteur de l’engin explosif, mais elle ne pouvait s’empêcher de se sentir coupable. Une culpabilité qui la rendait encore plus mal que tout le reste. Elle sentit une main venir se poser sur son épaule, ce n’était pas grand-chose et pourtant c’est à ce moment seulement qu’elle réalisa que ne pas voir son partenaire pendant si longtemps lui avait véritablement manqué.
« Il a sans doute pas supporté le retour.. on peut pas vraiment lui en vouloir.. »
C’est vrai après tout, comment pouvait elle lui en vouloir ? Une partie d’elle ne pouvait s’empêcher de souhaiter rendre une petite visite à Valentin peu importe l’endroit où il se trouvait maintenant, pour aller lui botter le cul et lui passer le sermon typique qu’une mère pourrait passer à son enfant. Cela aurait sans doute été très hypocrite de sa part. Elle se sentait nulle et fragile de l’admettre mais l’idée lui avait déjà traversée l’esprit. Pas en se tirant une balle dans la tête non, mais un truc moins horrible selon elle. Un soir, une nuit plutôt, alors qu’elle était encore tétanisée par le fait d’être dans le noir. Elle avait avalé une sorte de somnifère que lui avait prescrit le médecin qui l’avait pris en charge à l’hôpital. Il lui avait dit qu’elle pouvait prendre un comprimé en cas de terreurs nocturnes ou d’insomnie, mais n’ayant pas dormi depuis plusieurs jours elle était restée dix bonnes minutes avec le flacon dans les mains à se demander combien de ces petites choses il lui faudrait pour ne plus se réveiller, pour être libéré de ce cauchemar qui ne finissait pas. Lubna n’avait finalement pas été capable de le faire. En connaissant la peine ressentit suite à décès, faire subir la même chose à ses proches lui semblait purement égoïste, tout simplement inconcevable. Elle aurait tellement voulu que Val’ s’en rende compte avant d’appuyer sur la détente..
« Ouai.. c’est vrai, .. mais on va s’en sortir, on est dans battants »
Pourquoi toujours ce besoin de positiver ? Elle s’énervait elle-même parfois. Elle n’avait aucune idée d’où tout cela allait les mener, peut-être qu’eux aussi aller finir par mal tourner. Il était en colère, elle comprenait parfaitement sa réaction.. Après une grande inspiration silencieuse Lubna se retourna pour faire face à Jorah. Elle se sentait impuissante, ne sachant pas quoi faire. Ce n’était pas une petite tape dans le dos suivie d’un câlin qui allait arranger les choses.
« Désolé, je me mets à parler comme une psy.. »
Elle n’avait pas eu le courage d’aller lui rendre visite, de prendre de ses nouvelles plus tôt et maintenant elle se trouvait stupide. Elle connaissait suffisamment Jorah pour savoir qu’il n’allait pas bien. Son visage d’habitude si souriant, décontracté, qui arrivait toujours à lui donner le sourire semblait aujourd’hui bien différent. Il paraissait fatigué et pas en superbe forme, tout comme elle d’ailleurs. Le maquillage avait beau être une arme redoutable pour lutter contre les cernes et redonner du teint à la peau dans le cas présent il n’était d’aucune utilité.
« J’ai voulu passer te voir plusieurs fois, mais je me suis dégonflé et je crois même que j’ai fini par essayer de t’éviter. J’en suis pas très fière. »
Elle ne savait pas d’où lui était venu ce soudain besoin de lui dire tout cela. Sans doute de la culpabilité, encore et toujours. Il faut avouer qu'elle n’avait pas été une très bonne amie ces derniers temps.
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